CPTS, entre délires et insignifiances – Courrier des lecteurs du Quotidien du Médecin
Les représentants de médecins et des autres professions de santé se sont donc retrouvés pour définir ensemble les missions complémentaires des Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS). Pour rappel, des missions socles ont d’ores et déjà été fixées lors des précédentes réunions : accès à un médecin traitant, soins non programmés, organisation des soins, prévention. Les objectifs des missions complémentaires des CPTS seront définis précisément au niveau local, en fonction des besoins des territoires (…)
On a lancé l’idée des CPTS, idée informe, mal définie, floue à souhait, (on peut citer : « il s’agit d’une approche populationnelle c’est-à-dire que la réponse apportée s’inscrit dans une dimension qui peut amener les professionnels à sortir du cadre de leur exercice et de leur patientèle habituelle »… !?), sans doute un jour à l’usage de divers press-books, et on essaye désormais d’en remplir le contenu, de lui donner un sens : superbe façon de faire.
Les CPTS tentent donc d’exister après une création de toutes pièces… Et on assiste aux déclinaisons justifiant a posteriori leurs buts… Tout ceci est bel et bon mais nous nous trouvons réellement, depuis le début, dans l’insignifiance la plus totale quant aux buts avérés ou désignés…
Les missions dites socles s’apparentent déjà à de la bouillie pour les chats. L’UNCAM – donc le bureau du ministère concerné – donne ici l’impression de ne pas trop savoir quoi proposer quant aux buts des fabuleux CPTS (et il faut pourtant bien essayer de remplir les cases…. ! ).
Un gadget médical
Et on fait du vrac.Pertinence des soins : Je fais quoi ? Je juge de la justesse de mes soins, des demandes des patients ? pour déboucher sur quoi ?
Groupe qualité : ai-je vraiment le temps matériel de me lancer à tenter de créer une organisation et ensuite des points de réunions avec des confrères qui seront par ailleurs très difficiles à convaincre ? Même si certains ont pu en créer par amitiés, voisinages et autres, la pertinence de l’ensemble ramenée à notre profession reste toujours à prouver : c’est un gadget médical sans plus, à la mode surtout, mais dans la réalité de l’efficience générale ?
On va se retrouver (pour quel temps disponible ? ) pour échanger sur nos pratiques et à force d’échanger, on va harmoniser nos pratiques… La belle affaire, il y faudra combien de réunions ?
Et puis après c’est le filet garni. Repérage des patients à risques iatrogéniques ? On fait déjà couramment tous les jours, la CPTS ne m’apporte rien de nouveau. Dépistage du déclin cognitif ? Même chose, l’apport de la CPTS est nul. Antidépresseurs ? Là on sent le sujet très UNCAM : trop d’antidépresseurs. ? Que vient faire la CPTS là-dedans ? CPTS ou ROSP ? Insuffisance rénale chronique ? Là encore au fil des jours et des patients on surveille, la CPTS ne sert à rien en l’état !
Nous sommes des médecins adultes, responsables, le plus souvent avec des expériences lourdes et avec des poids spécifiques élevés. Nous sommes tous, et nous devrions tous à ce niveau être plutôt considérés comme de véritables « trésors nationaux vivants » en égard à notre apport irremplaçable en termes de soins, et de qualité de soins… ! On se gargarise de mots, d’expressions plus creuses les unes que les autres, dans un délire pseudo-organisationnel de bureau de ministère : où sont les réalités terrestres de notre exercice professionnel quotidien dans tout cela ?
Que faire d’une organisation bisounours ?
C’est l’organisation « bisounours » dans toute sa splendeur ! Tout ceci est une sorte de calque de société professionnelle rêvée ou plutôt fantasmée que l’on cherche à appliquer à une population donnée d’acteurs de santé sur un territoire défini. Mais il y a un énorme hiatus : tout ceci, cette vie rêvée, ne peut se faire que dans une société professionnelle apaisée, avec des marges réelles, ici complètement idéalisées, de temps libre et de possibilités de manœuvres y compris financières, pour chacun de ses acteurs de santé, marges et possibilités qui n’existent pas à ce jour, et qui ne risquent pas d’exister plus à moyen termes….
Alors ? Que vaut cet exercice ? Que pas un syndicat n’ait fait un préambule sur l’aspect fantasmé de tout cela en séance dite plénière à l’UNCAM me gêne toujours énormément. Pas vous ?
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Dr Jean-Marie Gendarme
Médecin généraliste,
Criel-sur-mer (76)
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