Certains infirmiers vont pouvoir prescrire des traitements
Par Solveig Godeluck
C’est un infirmier d’un nouveau type. Ce mercredi, le gouvernement va soumettre pour avis au Haut Conseil des professions paramédicales un décret créant l’infirmier de pratique avancée (IPA). Ce dernier pourra participer à la prise en charge globale du patient au sein d’une équipe de soins comprenant un médecin. Il sera autorisé à mener un examen clinique et à réaliser des actes techniques. Si nécessaire, il prescrira des examens, des dispositifs médicaux ou des médicaments dont la liste sera fixée par arrêté. Bref, ce « super infirmier » sera relativement autonome par rapport au médecin, même si ce dernier gardera la main in fine.
Salariés ou libéraux , les premiers professionnels bénéficiant de ce statut devraient pouvoir exercer à partir de septembre. Ils sont 300 à avoir suivi des formations inspirées des pratiques de plusieurs pays d’Europe et du Québec. Leur formation devrait être validée en même temps que seront mis sur pied les nouveaux modules universitaires. Les IPA auront un niveau master, soit deux ans de plus que le cursus classique, à effectuer après avoir exercé au moins trois ans en tant qu’infirmier généraliste.
Pratiques avancées ou coopération
Ces infirmiers de pratique avancée bénéficieront d’une meilleure rémunération – à négocier – et d’une plus grande autonomie. Mais il y aura peu d’élus parmi les 660.000 infirmiers exerçant actuellement : le gouvernement espère plus d’un millier d’IPA d’ici à 2021.
Fin avril, les principaux syndicats et associations ainsi que l’Ordre des infirmiers ont dénoncé dans un communiqué commun le manque d’audace du projet de décret. Principale pierre d’achoppement, la tutelle du généraliste au sein de l’équipe de soins. Les IPA devront signer avec lui un protocole décrivant leurs règles de collaboration. « Cette mesure est inutile eu égard aux compétences développées par les infirmiers de pratique avancée et de surcroît elle entretient la confusion entre pratique avancée et coopération », déplorent les infirmiers.
Les « protocoles de coopération » créés en 2009 permettent déjà aux médecins de déléguer certaines tâches aux infirmiers. Mais il n’y a ni diplôme ni rémunération supplémentaire à la clef pour les infirmiers.
Le maillon manquant
« S’il faut signer un contrat avec le médecin à chaque fois, on n’a pas besoin d’une infirmière IPA », estime Catherine Kirnidis, présidente du Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil). Pour elle, l’IPA ne doit pas être vue comme une innovation de circonstance, condamnée à disparaître lorsque les déserts médicaux se résorberont. « L’objectif, c’est d’ajouter le maillon manquant entre l’infirmière et le médecin. Nous sommes sur le terrain 7 jours sur 7, alors qu’il n’est pas toujours facile de trouver un médecin le vendredi à 17 heures », souligne-t-elle.
Jacques Battistoni, le président du syndicat de généralistes MG France, se méfie au contraire d’une trop grande autonomie des infirmiers. « Nous avons obtenu que les IPA exercent toujours au sein d’une équipe de soins de premier recours, dans le cadre de réunions de concertation, et que leur champ d’intervention soit délimité », se félicite-t-il. A ses yeux, le modèle à suivre est celui des protocoles de coopération, comme ces infirmières « Asalee », qui s’occupent d’éducation thérapeutique auprès des enfants ou de suivi des patients chroniques dans le cadre d’équipes de soins.
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